Mardi prochain, cela fera 3 semaines que nous sommes confiné-es.

Ces 3 semaines me semblent interminables. Pour autant ai-je l’impression d’avoir vĂ©cu 21 journĂ©es Ă  l’intĂ©rieur ? La rĂ©ponse est non. Les jours se ressemblent tellement ! Les mĂȘmes piĂšces, la mĂȘme balade en extĂ©rieur dans le kilomĂštre qui m’est autorisĂ©, les mĂȘme 4 personnes auprĂšs de moi, les mĂȘmes activitĂ©s


Une journĂ©e est tellement semblable Ă  l’autre que la somme de chacune d’elles ressemble Ă  gloubiboulga de temps.

Je me pose souvent la question de ce que je me souviendrai de cette pĂ©riode. Pour l’instant, je crois que l’image mentale que j’en aurai ressemblera sans doute Ă  ce gloubiboulga flou et hors du temps, sentiment « hors du temps » sans doute et en partie crĂ©e dans mon esprit par mon incapacitĂ© Ă  me projeter.

En effet, il semble difficile aujourd’hui de prĂ©voir Ă  quel moment nous serons autorisĂ©-es Ă  sortir de chez nous pour aller voir nos ami-es, nos familles, Ă  quel moment nous serons autorisĂ©-es Ă  retourner travailler ; difficile de prĂ©voir aussi comment se passera le dĂ©confinement, quelles en seront les Ă©tapes, dans quel ordre ces Ă©tapes auront lieu. Je me suis faite Ă  l’idĂ©e que les gestes barriĂšres devront perdurer un certain temps aprĂšs ce dĂ©confinement. Mais combien de temps cela durera de maniĂšre effective ? A partir de quand serons nous autorisĂ©-es aux CEMEA Ă  remettre en place des formations en face Ă  face ?

ça dĂ©pendra bien sĂ»r de l’évolution du pic Ă©pidĂ©mique, de la saturation des services de rĂ©animation, du nombre de place disponibles Ă  l’hĂŽpital public (scandale politique), de la production massive de tests (scandale politique), de la production ou de l’import de masques en nombre suffisant (scandale politique)

Bref tout cela est bien flou (et scandaleux). Je n’ai que trĂšs peu d’emprise sur l’organisation de mon demain. Ma marge de manƓuvre, ma possibilitĂ© de manifestations quant aux diffĂ©rentes dĂ©cisions politiques ne me conviennent pas.  Je me sens coincĂ©e dans ma maison, dans un prĂ©sent insaisissable et dans une forme de soumission.

En dĂ©but de semaine derniĂšre, mes balises physiques et psychiques ont commencĂ© Ă  clignoter en rouge, Philippe et les enfants ont commencĂ© Ă  s’inquiĂ©ter pour moi. Par chance j’avais posĂ© une semaine de vacances, je me suis donc obligĂ©e Ă  trouver du temps et de l’énergie pour me sortir le nez des infos COVID 19, du travail intimement liĂ© Ă  la pĂ©riode corona, de la famille (fonctionnement familial emprunt du contexte sanitaire). J’avoue que j’ai eu du mal Ă  lĂącher


Et puis Lire un roman, coudre, me poser au soleil, Ă©couter des sons apaisants enregistrĂ©s par une amie, Ă©couter de la musique
 faire des trucs pour moi, rien que pour moi m’ont permis de lĂącher, de rĂȘver un peu et de me ressourcer.

Et puis participer Ă  l’enregistrement de sons pour la Radiosansnous m’a encrĂ©e dans prĂ©sent constructif et plaisant. ça m’a donnĂ©e le sentiment d’ĂȘtre un peu actrice et de moins subir les dĂ©cisions politiques de l’état d’urgence sanitaire.

La semaine derniÚre a été éprouvante pour Jeanne et Selma.

Le flou autour de leur condition de passage du bac les a dĂ©mobilisĂ©es, dĂ©motivĂ©es. Selma a complĂštement craquĂ© le jeudi soir. « Et comment on va s’organiser si on ne sait pas si on va passer les Ă©preuves ou pas ? », « A quoi ça sert de bosser si on doit tout rattraper aprĂšs ? », « Est-ce que je dois travailler mes notions ? », « Et si on nous valide le bac en partie avec le contrĂŽle continu, ça sera quoi les Ă©preuves ? ». Des questions auxquelles je n’avais pas de rĂ©ponses, auxquelles les profs n’avaient pas de rĂ©ponses, auxquelles le gouvernement ne donnaient pas de rĂ©ponses. Le vendredi matin, Blanquer a parlĂ©. Pour la 3Ăšme fois en 3 semaines, je me suis retrouvĂ©e Ă  regarder en direct une allocution tĂ©lĂ©visĂ©e.

« L‘ensemble des Ă©preuves seront validĂ©es par la note obtenue dans les disciplines concernĂ©es durant les trois trimestres de l’annĂ©e de terminale, Ă  l’exception des notes obtenues pendant la pĂ©riode de confinement »

« Les candidats n’obtenant pas le baccalaurĂ©at en juillet (note globale en-dessous de 8/20) pourront le repasser Ă  la session de septembre sur dĂ©cision du jury d’examen et aprĂšs Ă©tude des livrets scolaire. Les critĂšres d’assiduitĂ© et de motivation seront notamment pris en compte. »

« Les cours auront lieu jusqu’au 4 juillet »

«  Les notes des épreuves  déjà passées en premiÚre sont gardées »

La levĂ©e du flou a provoquĂ© chez Jeanne et Selma des rĂ©actions diverses. Des inquiĂ©tudes pour certain-es de leurs ami-es. Une sorte de dĂ©ception liĂ©e au fait de ne pas passer le bac « comme tout le monde » et de valider un bac « au rabais », des questions et dĂ©ceptions quant Ă  leurs options. Mais le sentiment le plus fort, et puisqu’elles ont toutes deux des notes au-dessus de 10, fut le soulagement. La prise en compte des notes du 3Ăšme trimestre et l’obligation d’assiduitĂ© les a aussi reboostĂ©es.