A l’annonce de la fermeture des établissements scolaires et des autres lieux recevant du public, très majoritairement, nous avons organisés le télétravail, et mis en place des outils pour maintenir un contact avec les publics, et militant-e-s engagés pour faire vivre l’éducation populaire.
Nous sommes convaincu-es de la nécessité d’organiser à grande échelle la lutte contre cette pandémie, et nous appliquons et diffusons les mesures nécessaires : traduction et diffusion des gestes barrières, relai des informations, élargissement des réseaux d’entraides etc…
Les mesures de confinement prononcées s’allongent semaines après semaines, et nous sommes obligés de constater que le #Restezchezvous n’implique pas les mêmes choses pour l’ensemble de la population, voir est impossible pour certain-e-s.
Aujourd’hui, nous nous alarmons de la situation de nombres personnes, tant au niveau de la protection sanitaire que de la situation sociale. Les fractures se creusent, et elles sont de différents ordres :
– Nous prêtons une attention à la santé des corps. Or nous ne pouvons pas réduire le système de santé, à sa dimension de « soin du corps » et nous devons l’articuler avec le soin du psychique et du mental.
– Fracture numérique : la continuité éducative, dont on a tant entendu parlé, a mis à jour le trou béant de la fracture numérique, tant au niveau de l’équipement que de la capacité à utiliser ces outils pour communiquer, s’informer, organiser sa (sur)vie quotidienne ou travailler…
– La fracture économique et sociale est elle aussi flagrante à travers les récits de confinement d’une partie de la population qui en profite pour « faire une pause » et celle qui se sent enfermée voire entassée, dans des situations aggravant parfois des situations de violence intra-familiales et des difficultés pour subvenir à ses besoins.
– Enfin une fracture politique se dessine également autour de moyens que nous avons pour comprendre et penser la situation que chacun.e de nous vit. A quelles informations nous avons accès et comment s’y repérer dans l’amas de fake news qui circulent ? Les théories complotistes se répandent à grande vitesse, alimentant des réflexions racistes et populistes qui reprennent rigueur tout aussi vite.
Le lien numérique nous a permis dans un premier temps de combler l’impossibilité d’être ensemble mais on en voit les limites dès que cette situation prétend s’installer dans le temps. Nous tentons également de combler une partie de ces fractures, en organisant l’impression de devoirs pour certains élèves, la distribution d‘attestation de déplacement…
La situation sociale et politique nous amène à penser qu’il y a un immense besoin d’éducation populaire, après le confinement mais aussi dès maintenant. Il faut permettre à chacun.e de comprendre ce qui se passe pour elle et lui mais aussi pour les autres afin de pouvoir construire la suite sans oublier personne.
Pendant le confinement :
Pendant le confinement, les outils numériques ne peuvent se suffire. Pour dépasser la peur et la violence et pour construire la suite, il nous semble nécessaire de pouvoir poursuivre notre action au-delà du seul lien téléphonique et numérique ; en organisant différentes modalités de rencontre avec les publics, tout en s’assurant de la mise en place des mesures permettant la sécurité physique des personnes en période de pandémie. Des équipes d’animation assurent déjà cette présence depuis 4 semaines à travers l’ouverture des accueils de mineurs pour les enfants des soignants.
Notre présence physique est d’autant plus nécessaire que nombres de personnes sont touchées par ces « différentes fractures » en même temps.
Les équipes d’animation doivent pouvoir assurer une présence physique, complémentaire de nos présences « numériques ». Cette présence doit bien sûr prendre en compte les données scientifiques dont on dispose sur cette pandémie. La forme de ces présences est encore à construire, des maraudes dans un premier temps permettrait de renouer le contact avec une partie des populations, d’accompagner une compréhension politique de la situation… La présence physique dans certains quartiers ne peut être qu’une présence répressive.
L’organisation d’une présence physique dans des secteurs économique jugés « clés » est mis en place, elle devient urgente à mettre en œuvre dans le champ de l’éducation populaire.
Nos propositions
– L’instauration de maraudes pour mesurer les besoins et créer des temps d’échange
– Impulser, quand il n’existe pas déjà, des solidarités par immeubles, par rue avec des affichages : « J’ai besoin, je propose, je peux faire… » Cela peut aller des courses, aux feuilles d’attestation, à l’impression de documents, au partage de wifi, garde d’enfants sur un temps ponctuel…
– Maintenir de l’économie de circuit court avec proposition d’alimentation de fruits et légumes (AMAP…)
– Diffuser des documents, proposer des échanges qui permettent de comprendre et d’analyser la situation
– Lancer des permanences sociales…
L’après confinement :
Sans connaître la date de fin de confinement, nous sommes déjà en réflexion sur les actions pour sortir du confinement.
La situation économique que crée le confinement pourrait tenter certain-e-s de ne pas juger prioritaire les vacances et les loisirs. Pour autant en sortie de crise, ces espaces de rencontres, d’échanges avec des personnes autres que celles de son quotidien, seront indispensables. Si les formes doivent sans doute se réfléchir, le nombre de personnes autorisées à se rassembler par exemple, nous ne devons pas sacrifier ces rencontres sous couvert de mesure économique, et d’effort de guerre.
En tant qu’acteur de l’éducation populaire, nous participerons à ce que tout le monde construisent une compréhension des événements, qui s’appuient sur le partage de vécu, et l’exercice d’une critique quant aux informations qui circulent. Mais ce travail doit se démarrer maintenant, se poursuivre à l’issue du confinement, et être soutenu par les différents partenaires publics.
Nos propositions
– un rapprochement des communes et des associations d’éducation populaire, et de jeunesses afin de relancer une présence physique plus importante pour répondre à des besoins nouveaux
– permettre cet été de vivre de réels temps de loisirs et de vacances. Il convient sur la période de Juillet et Août de ne pas refaire l’école après l’école. Il sera toujours temps de mettre en œuvre ces actions en Septembre. Mais les enfants, jeunes, adultes ont besoin d’un temps de vacances, de rupture surtout après la période anxiogène que nous vivons.
– le maintien d’une politique de loisirs, de vacances, et culturels, ambitieuse à l’issue du confinement : cette politique sera bien sur à construire selon les normes sanitaires en place. Nous souhaitons la mise en place d’espace de concertation pour la construction de ces politiques. Ambitieuse car le gouvernement investit actuellement des milliards dans le maintien de l’économie mais annonce dores et déjà une politique publique d’austérité pour 2021/2022… Il nous semble que l’éducation populaire entre autres ne doit pas subir les coupes à venir.